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Ministère du Travail

Le partage du succès : pratique novatrice mise en place chez Alcan

Alcan, qui appartient au groupe Rio Tinto Alcan, est une société mondiale de premier plan dans l’extraction de la bauxite, le traitement de l’alumine, la production d’aluminium de première fusion, la production d’électricité, la transformation de l’aluminium, les produits usinés ainsi que les emballages flexibles et de spécialité. Employant 68 000 personnes réparties dans 61 pays et régions, incluant ses coentreprises, Alcan a son siège social à Montréal pour deux de ses quatre groupes d’exploitation (bauxite et alumine). Elle compte 27 établissements de production au Québec.

L’entreprise a pour objectif d’innover en fondant ses décisions et ses actions sur la création d’une valeur durable pour l’entreprise et ses parties prenantes. Depuis 2003, elle a implanté le Système de gestion intégrée Alcan, appelé en anglais AIMS, qui repose sur :

  • la gestion axée sur la valeur pour une meilleure discipline financière ;
  • le programme « ESS en tête » pour l’excellence en environnement, santé et sécurité ;
  • l’amélioration continue afin que chaque employé adopte les meilleures façons de faire ;
  • l’atout humain qui témoigne de l’engagement d’être le meilleur employeur possible, capable d’attirer et de fidéliser les personnes les plus compétentes. C’est dans un tel contexte que l’entreprise a mis en place un programme de rémunération variable.

Fonctionnement du programme

La rémunération variable, inscrite dans la convention collective expirant en 2011, comporte une cible de 6 % de la rémunération annuelle de base. Le montant exact peut être supérieur ou inférieur à 6 % selon l’atteinte des objectifs. Si l’usine atteint la totalité des objectifs, les employés recevront 6 % et si elle dépasse ses objectifs, la prime sera supérieure à 6 %. Jusqu’à présent, les employés ont généralement reçu des montants supérieurs à la cible. La moyenne payée depuis l’introduction du programme en 1998 représente environ 130 % de la cible. Pour une année donnée, certaines usines ont cependant versé des montants inférieurs à la cible alors que d’autres parvenaient presque à la doubler en raison de résultats exceptionnels.

La cible de 6 % est rattachée à deux volets pour les employés syndiqués. Une part de 2 % dépend des résultats d’ensemble d’Alcan, la « valeur économique ajoutée », et l’autre part, de 4 %, des résultats du centre d’affaires relevant de l’usine. Les cadres ont cependant choisi de répartir les deux volets en proportions égales (3 % rattachés à la valeur économique ajoutée et 3 %, aux résultats de leur centre d’affaires).

Les résultats attendus du centre d’affaires comprennent l’atteinte de quelques cibles, dont des objectifs de coûts et budget, de santé-sécurité, d’environnement, de production, de même que certaines priorités stratégiques qui s’ajoutent pour l’année en cours. La performance mesurée en santé-sécurité et environnement tient compte de la réduction du nombre d’accidents, selon leur fréquence et leur gravité, d’une réduction des émissions environnementales et du respect de protocoles en matière de santé et de sécurité. En ce qui a trait aux indicateurs de production, des éléments relatifs aux opérations peuvent être introduits, tels que le taux de recouvrement du métal pour le centre de coulée ou l’efficacité énergétique dans les salles de cuves. Les mesures sont prises sur une base régulière et une communication relative au suivi des résultats de la rémunération variable parvient aux employés trimestriellement. Ces mesures permettent d’établir des niveaux de rendement, mais la mesure exacte demeure néanmoins fragile.

L’implantation de la rémunération variable chez Alcan s’est faite de façon progressive. Au début, lorsque la rémunération variable a été introduite en 1998, les employés syndiqués ont choisi de transférer, sur trois années consécutives, une partie de leur augmentation de salaire pour faire en sorte que le boni cible de la rémunération variable passe de 1,5 % à 6 %. Le 1,5 % de base avait été constitué quelques années auparavant et représentait la valeur d’un boni associé au prix du métal. Lors de la négociation de 1998, les parties ont préféré transférer la valeur de ce boni métal pour constituer la base de la rémunération telle qu’on la connaît aujourd’hui et, pour l’année 1998, les salariés ont investi 2,5 % de leur augmentation salariale pour que le boni cible atteigne 4 % et, pour les années 1999 et 2000, ils ont transféré 1 % de leur augmentation pour chacune de ces années afin que le boni cible de la rémunération atteigne le niveau de 6 % qui avait été convenu et qui est appliqué depuis lors.

Les employés acceptent de lier une part de leur rémunération, en l’occurrence 6 %, à la performance de l’entreprise tandis que l’autre part (94 %) demeure sous forme de salaire fixe. Le pourcentage associé est toutefois progressif chez Alcan et reflète, d’une certaine manière, le degré de vulnérabilité. Ainsi, les superviseurs peuvent engager une part plus grande, les gestionnaires de division seront à un niveau plus important et le directeur aura le taux le plus élevé.

Quelques avantages : une meilleure compréhension des opérations d’ensemble et une motivation moins individualiste

L’information qui circule dans l’entreprise, qu’il s’agisse des cibles, de leur définition, des mesures pour les jauger ou de questions plus générales de rendement, fait en sorte que les employés sont beaucoup plus au fait des éléments qui interviennent dans le fonctionnement et la productivité de leur entreprise.

La valeur économique ajoutée est considérée par l’employeur comme étant une meilleure approche que celle dite de partage des bénéfices dans la mesure où les employés peuvent, dans certains cas, constater la mesure de leur performance par rapport aux objectifs. À titre d’exemple, le taux de rendement de la production des cuves détermine une part des résultats et la progression du taux reflète ainsi les efforts des employés. À l’inverse, la répartition des bénéfices obtenus ne reflète pas nécessairement la performance des employés, mais parfois davantage les conditions du marché et de l’industrie. Compte tenu que la valeur économique ajoutée est ajustée pour tenir compte de la variation des prix du métal et du taux de change des devises, la performance mesurée est plus liée à la performance des employés, donc à des facteurs internes, que le partage des bénéfices qui, lui, est souvent lié à des facteurs externes.

Ce type de rémunération est considéré par l’employeur comme étant plus avantageux que les bonis à la production, car il fait appel à une mesure des résultats d’ensemble contrairement aux bonis qui sont attribués sur une base individuelle.

Facteurs de succès

Au départ, il est important que les objectifs soient réalistes et crédibles. Des objectifs trop ambitieux peuvent en effet avoir un effet négatif sur le climat de travail.

Par ailleurs, l’entreprise publie une information trimestrielle pour rendre compte de l’état d’avancement : il ne s’agit pas de dicter un objectif au début puis de donner le résultat à la fin. Il est essentiel de faire un suivi tout au long de l’année et de pouvoir réajuster la conduite des opérations au besoin. La cible est donc transposée en action. Dans le domaine santé-sécurité, l’attention accordée au suivi des indicateurs est primordiale.

Ce programme n’est toutefois qu’un élément d’amélioration parmi d’autres. En particulier, le rôle des gestionnaires pour mobiliser les employés demeure essentiel. Depuis le début des années 1990, certaines responsabilités de gestion ont été transférées aux employés : suivi des budgets, réalisation des inspections, gestion des approvisionnements. Ces éléments ont aussi eu des effets significatifs sur la mobilisation du personnel.

Soulignons que les critères relevant d’autres usines reflètent un effort d’ensemble et ceux propres à la corporation font partie des éléments qui s’éloignent de la zone d’influence des employés d’une usine en particulier. D’autres éléments incontrôlables interviennent également, tels que le déplacement des marchés, la conjoncture économique et la hausse des coûts de matières premières qui peuvent avoir une influence sur les résultats.

Du côté syndical, les membres se disent satisfaits de recevoir ces montants supplémentaires. Cela est particulièrement vrai lorsque les primes dépassent le boni cible comme cela arrive régulièrement. Le programme contribue à instaurer un esprit de bonne entente entre les parties.


Informations obtenues de l’entreprise le 31 octobre 2007