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Ministère du Travail

Sommaire : Pour un Code du travail renouvelé

Mise en contexte

Adopté en 1964, le Code n’a été substantiellement modifié qu’en 1969 puis en 1977. Depuis, les seules modifications introduites répondaient à des besoins pressants et ne portaient que sur des objets limités, sans perspectives globales et sans viser à adapter la loi à la réalité mouvante du travail. Conséquences de ces modifications à la pièce, on constate que bon nombre de problèmes sont restés sans solution et nuisent au bon fonctionnement du régime. Au surplus, une partie des "nouveaux" travailleurs, quoique désireux de profiter du régime, n’y ont pas accès.

Quatre principes directeurs

Premier principe

Le Code du travail doit demeurer un instrument qui favorise le libre exercice du droit d’association des personnes salariées, aux fins de la détermination des conditions de travail par la voie de la négociation collective avec leur employeur.

Ce principe révèle l’importance que l’on accorde à l’expression de la volonté libre des individus d’adhérer à une association qui, une fois démontrée sa majorité, pourra obtenir le droit exclusif de représenter l’ensemble des salariés dans le cadre et pour les fins de la négociation collective des conditions de travail.

Deuxième principe

Dans un régime comme le nôtre, les parties aux rapports collectifs du travail favorisent la voie contractuelle et veulent ainsi demeurer libres de disposer de leur avenir.

En vertu de ce principe, l’État se doit de rester en marge de la négociation collective et d’agir comme accompagnateur ou facilitateur. À cet égard son rôle est bien différent de celui qu’il joue dans le contexte de l’application d’une loi comme la Loi sur les normes du travail.

Troisième principe

Les modifications au Code du travail doivent tenir compte du contexte nord-américain.

Le respect de ce principe suppose que l’exercice de révision entrepris n’entend pas remettre en cause les piliers caractéristiques du régime nord-américain des rapports collectifs du travail qui sont : 

  • la dichotomie employeur / salarié;
  • l’accréditation sur la base de l’entreprise;
  • le monopole de représentation conféré à une seule association représentative.

Quatrième principe

La révision du Code du travail doit être centrée sur la recherche d’une plus grande efficacité de la loi et de son administration et tenir compte de nos us et coutumes en matière judiciaire.

Le premier volet du principe parle de soi. En ce qui concerne l’idée de prendre en compte nos us et coutumes en matière judiciaire, il suffit d’être conscient qu’une modification, aussi mineure soit-elle, du texte de loi est susceptible de lancer la course au test final des tribunaux judiciaires. Pour cela, on devrait, autant que faire se peut, éviter les modifications au texte de loi qui n’auraient qu’une fonction esthétique.

Objets de consultation

Ils sont aussi au nombre de quatre, le dernier étant largement tributaire des choix que nous ferons éventuellement sur les trois premiers objets.

Premier objet : l’accessibilité et l’efficacité du régime

Il concerne principalement l’ouverture du régime des rapports collectifs du travail à une nouvelle classe de "quasi-salarié", les entrepreneurs qu’on dit dépendants économiquement. Cette catégorie de travailleurs autonomes est exclue du droit d’association en vertu du Code, simplement parce qu’en 1964 nul ne pouvait imaginer son existence!

L’accessibilité est aussi diminuée par la lourdeur du processus d’accréditation.

Le Code du travail devrait donc se faire plus perméable au nouveau salariat et donner aux organismes d’application de la loi les moyens d’améliorer l’efficacité administrative du régime.

Deuxième objet : les rapports collectifs

Un certain nombre de ratées ou de difficultés de fonctionnement du régime sont associées au fait que, d’une part, certaines mesures de protection de l’accréditation et de la convention collective, comme l’article 45 du Code du travail lorsque survient une "transmission d’entreprise", sont rédigées et appliquées de telle manière qu’elles ne laissent aucune marge de manœuvre au commissaire du travail, qui cherche à en adapter l’application aux situations contemporaines.

D’autre part, même si le nombre des conflits de travail a considérablement diminué ces dernières années, il demeure que certains d’entre eux s’étirent sur de très longues périodes, sans que le ministère du Travail, pourtant mandaté pour aider les parties à développer et à entretenir des rapports de travail harmonieux, n’ait de moyens de dénouer l’impasse.

Le Code du travail devrait donc être modifié pour permettre au décideur d’introduire une marge de souplesse dans l’application de l’article 45, par exemple en l’autorisant, sans preuve de difficulté insurmontable à l’appui, à tenir un vote pour déterminer le désir de salariés d’accréditations et d’appartenance syndicale différente, mis en présence par une vente d’entreprise, quant au choix de leur représentant autorisé à amorcer une nouvelle négociation. Quant aux conflits de longue durée, on pourrait proposer l’inscription au Code de mécanismes spéciaux de résolution du différend (arbitrage obligatoire des propositions finales, médiation-arbitrage ou autres mécanismes " doux ").

Troisième objet : les corrections nécessaires à la loi

On ne peut prétendre à un exercice de révision d’une loi vieille, pour l’essentiel, de presque 40 ans, sans corriger certains problèmes d’application, moderniser la terminologie et retoucher la structure même de la loi. Il suffit de procéder à une lecture attentive du texte de loi pour constater qu’on retrouve çà et là des expressions qui renvoient à des pratiques depuis longtemps disparues (le flottage du bois, l’accès à des campements miniers); des règles distinctives pour des objets pourtant semblables (durée d’application d’une sentence arbitrale limitée à deux ans dans le cas d’un arbitrage volontaire, trois ans pour les policiers ou pompiers municipaux); un contenu qui aurait avantage à se retrouver dans un règlement consolidé.

Quatrième objet : les instances du travail, constitution et pouvoirs

Conséquente avec le principe directeur voulant qu’on tienne compte du contexte nord-américain, notre réflexion sur les instances d’application de la loi doit se faire à la lumière de la comparaison avec nos voisins. Or, au contraire des nôtres, les organismes du travail fonctionnent ailleurs selon un modèle qui prend ses distances de celui des tribunaux judiciaires. Ces divers organismes ou commissions disposent également de pouvoirs d’ordonnance vastes, privilégiant la réparation à la punition, et leurs décisions sont sans appel. Ces commissions ont donc tout le loisir de se doter de règles de fonctionnement et d'adopter des politiques qui favorisent l'atteinte de l’objectif premier de la loi, faciliter l’exercice du droit d’association. Ce modèle ne nous est d’ailleurs pas totalement étranger, puisque notre Conseil des services essentiels fonctionne sur les mêmes bases.

Puisque la meilleure efficacité de l’administration du Code fait partie des objectifs du processus de révision en cours, on ne peut escamoter la question de savoir si une part de l’amélioration souhaitée ne pourrait pas parvenir de la suppression du droit d’appel des décisions du BCGT. Ne pourrait-on pas, du même souffle, confier à un BCGT " amélioré " des pouvoirs du même ordre que ceux dont disposent les autres commissions? Ou, serait-il plutôt souhaitable de prendre le virage d’une Commission des relations du travail.

Ministère du Travail
2000-03-07